Une nouvelle sortie nocturne. Enfin, nocturne… il était passé vingt-et-une heure, du moins. Juste assez pour que le ciel commence à s’éclaircir et qu’on puisse voir un faisceau de lumière au bout des baguettes de certains élèves. Au travers de toutes ces jambes pressées qui rentraient vers le château, une petite boule de poil noire se faufilait et défilait le long des dédales de pierres au sol. Kessy, ce soir, était à la recherche d’un coin tranquille. Un endroit où passer la soirée sans qu’on le dérange. Peut-être un endroit où il pourrait dormir à la belle étoile sans un de ces élèves qui ne cessaient de se confier à lui, comme si le fait d’être un chat donnait une bonne raison à tous les autres de le prendre comme un journal intime. Vraiment. L’herbe humide le faisait grincer des dents. S’il y avait bien une chose qu’il détestait, c’était l’eau. La pluie. Comme celle qui s’était abattue sur Atlantis toute la journée. Des flaques d’eau, l’herbe humide. Tout. Il détestait l’eau. Le simple fait de se savoir à des kilomètres et des kilomètres de la surface de la terre le rendait malade. Pourquoi avoir créé un ciel où les orages, les tempêtes, la pluie et la neige existait si ces facteurs étaient des choses dont on ne voulait point ? C’est vrai. Si c’était lui, rien de tout ça n’aurait été. Le ciel serait constamment gris et le temps ne serait jamais trop chaud ni trop froid. Lorsque sa patte tomba dans une de ces nombreuses flaques, il grogna discrètement et accéléra le pas. c’était dans ces moments-là qu’il était heureux de pouvoir courir beaucoup plus rapidement que sous sa forme humaine, tout ça sans avoir l’air d’un parfait idiot. Bientôt, les élèves se firent bien loin de son champs de vision et ses pattes foulaient le sol toujours humide du grand cimetière de l’école. C’était un peu macabre comme endroit pour rechercher la paix, mais il avait appris avec le temps que les morts-vivants n’existaient pas réellement. Il y avait, effectivement, pleins de créatures beaucoup plus effrayantes que ces monstres de science-fiction… malgré tout, plusieurs élèves n’osaient même pas observer le cimetière plus de trente secondes. Lui, il y allait régulièrement. Justement pour profiter du calme de l’endroit. Une petite partie de chasse parfois, aussi, parce qu’on y retrouvait toutes sortes de bestioles. Des araignées et des souris, notamment, et il ne pouvait s’empêcher de vouloir les chasser chaque fois qu’il en croisait une. Instinct félin, certainement. La bête se glissa entre deux tombes et se laissa retomber au milieu d’une dizaine de bouquets de fleurs. Il ne savait pas à qui appartenait cette tombe, mais visiblement, elle était la plus visitée de tout le cimetière. La plus vieille, également, vu les dates. Yu Song Hee. Ça lui disait vaguement quelque chose, mais il n’avait jamais réellement cherché à savoir l’histoire d’Akiwa. En même temps, le simple fait de se retrouver sous l’eau le faisait flipper, pas besoin d’en rajouter une couche pour lui rappeler tous les jours où il se retrouvait… n’avait-il pas faillit l’évanouissement lorsqu’il avait appris où se situait l’académie ? Hm. Il soupira et posa sa tête contre le ciment, ses yeux se fermant doucement et sa queue se balançant dans les airs.

Le sommeil lui vint rapidement, bien que léger. En même temps, normal, lorsqu’il était sous sa forme féline ; il dormait partout, n’importe quand et à n’importe quel moment. Contrairement à lorsqu’il était sous sa forme humaine. On aurait facilement pu penser qu’il en aurait prit l’habitude sous sa forme humaine également, vu tout le temps qu’il y avait passé à être un chat… mais non. Ironiquement, il était plutôt du genre insomniaque. C’est pourquoi, la nuit, il préférait souvent devenir un chat et sortir sur le toit pour se reposer. Ça, évidemment, c’était du moment où il ne pleuvait pas toute la journée… et toute la nuit. Comme la nuit précédente. C’est au bout de quelques minutes que le félin renifla nerveusement, son nez se plissant, ses yeux tremblant tout comme ses petites moustaches. Quelque chose venait de lui chatouiller le bout du nez. Quelque chose qui, automatiquement, venait de réveiller ses instincts. Et venait de faire envoler tout le sommeil qu’il avait contenu, d’ailleurs… il ouvrit soudainement les yeux, ses pupilles beaucoup plus noires au centre de ses iris jaunes brillants. Il tourna rapidement la tête, juste le temps de voir la queue d’une souris se faufiler entre les herbes assez hautes. Ses griffes grincèrent contre le ciment et il se redressa rapidement après quelques secondes de fixe, se lançant à la poursuite de la petite bête. Une pierre tombale, deux, trois. Quatre. De l’herbe trempée, des flaques d’eau, une souris qui se faufile et… un trou. Un énorme, gigantesque trou. Petit à la fois. Profond, mais à peine assez large pour qu’il puisse y tomber. Un long miaulement s’échappa de la gorge du félin qui tomba dans le piège, sur ses quatre pattes. Il fut abasourdi un bon moment, observant le vide devant lui, le noir, la terre tout autour de lui. Sortir d’ici. Il devait absolument se sortir d’ici avant qu’on ne l’enterre vivant ou, alors, pire, que la pluie ne revienne inonder ce trou qui n’était pas des plus secs lui non plus d’ailleurs. Redevenir humain ? Impossible, pas dans ce trou. S’il le faisait, il mourrait certainement asphyxié, étouffé. Il n’était pas large, mais pas assez mince non plus pour se glisser sans difficulté. S’il se transformait maintenant, il serait certainement enterré vivant. Chose qu’il ne voulait pas, on se l’accorde. Grimper était une option à rayer tout de suite, même effet avec la terre peu solide. Il leva alors la tête vers le ciel et attendit patiemment, comme si, le dit ciel, devait lui apporter une solution rapidement. Comme dit, il entendit des pas, une voix qui chantonnait. Un ange gardien ? En avait-il un ?

Un long miaulement de détresse s’échappa du trou dans lequel il était coincé. C’était une femme, une élève probablement. Dans tous les cas, c’était encore mieux si c’était une jeune femme, parce qu’elle ne résisterait certainement pas à l’envie de sauver un pauvre petit chaton coincé et voué à la mort si elle le laisse et ne fait rien. Enfin, c’était typique, mais c’était bien vrai. N’importe quel garçon un peu débile aurait parfaitement pu l’enterrer vivant « juste pour s’amuser. » Voyant que ça ne fonctionnait pas – qu’elle ne l’avait probablement pas entendu – il recommença son appel au secours. Un deuxième, un troisième, un quatrième, et au bout du cinquième, il était convaincu d’entendre des pas venir vers le trou. Il redoubla alors d’efforts jusqu'à voir la silhouette de la dite jeune femme qui se penchait pour regarder dans son piège et voir ce qui s’y passait, certainement. Il se redressa alors sur deux pattes et posa délicatement ses deux pattes d’avant sur le mur de terre le plus solide des quatre, miaulant à nouveau pour qu’elle l’aide à se sortir du pétrin, pleurant un peu plus fort pour qu’elle ne parte pas. le trou n’était pas si profond que ça pour un humain, du moins, il espérait qu’elle arriverait à l’atteindre et qu’elle n’était pas une de ces méchantes sorcières. Son regard se fit alors suppliant.

La sauveuse. Peut-être qu’il avait un ange gardien, au final, même s’il ne le méritait pas tellement. Son soulagement fut tel qu’il colla son museau contre le cou de la jeune femme en guise de remerciement, se laissant câliner. D’ordinaire, il n’était pas très câlin. Certes, avec les jeunes femmes, il aimait bien profiter des câlins à leur insu, parce qu’évidemment, elles ne savaient pas que se cachait un jeune homme âgé de vingt ans derrière cette petite bête toute noire. Pas qu’il était réellement un pervers dépravé et profiteur, mais les caresses féminines faisaient toujours plaisir, et n’importe quel homme normal s’accorderait sur ce fait… il se vautra au creux de ses bras, d’autant plus heureux qu’elle l’apporte à l’abris sous un arbre, là où la pluie ne l’atteignait pas vraiment. Non, ce n’était pas très « masculin » que d’avoir peur de l’eau à ce point, mais dans son cas, il n’y avait rien de plus normal. Y avait-il quelque chose que les félins craignaient plus que l’eau ? Non, sûrement pas. du moins il ne croyait pas. C’était horrible. Pourquoi était-il sorti alors que la pluie ne cessait de s’arrêter pour recommencer par la suite ? Le pire temps possible, pour lui. Tout ça lui rappelait qu’ils se situaient sous l’océan. Un long frisson d’horreur redressa les poils sur son dos et il retrouva bientôt le sol, s’écartant de la jeune femme pour se secouer de l’eau et de la saleté qui le recouvrait. Un vrai chat d’apparence. Il passa même un coup de langue sur sa patte, son autre venant gratter le derrière de son oreille. Vraiment inconfortable. S’il n’avait pas si peur de l’eau, une bonne douche lui ferait bien plaisir, en ce moment, tiens. Mais chez lui, même prendre sa douche était un supplice. Ironique pour un garçon qui ne supportait pas la saleté, n’est-ce pas ? Le destin jouait parfois des tours. Il en avait joué tout un au pauvre Kessy, d’ailleurs… lorsqu’il redressa la tête, ses yeux s’écarquillèrent soudainement à ce qu’il vit. La jeune femme si douce, si gentille qui venait de le sauver à l’instant pointait une baguette vers lui. Soudainement, le scénario semblait se changer en entier dans sa tête. Elle ne l’avait pas sauvé. C’était une bourreau des chats ! Ou peut-être des animaux tout court, même. Elle avait été attirée par les miaulements parce qu’elle voulait torturer une autre de ces pauvres bêtes. Ah non, elle était tombée sur le mauvais, cette fois, il ne se laisserait pas faire. Il s’apprêtait d’ailleurs à s’enfuir lorsqu’un long filet de lumière vint l’atteindre, le paralysant un instant. Une douleur persistante s’empara de lui, tout au long de sa colonne vertébrale, sa mâchoire, son corps en entier. Une transformation obligée ? Horrible. Il ferma douloureusement les mains et un long grognement s’échappa de la gueule du chat, des cercles lumineux l’encerclant soudainement alors qu’il reprenait forme humaine de la façon la plus douloureuse qu’il n’ait jamais subit. Normal… puisque c’était une transformation forcée à laquelle il ne s’était pas attendu, à laquelle il n’avait absolument pas consenti.

La douleur persista jusqu’à ce qu’il ait reprit sa forme humaine en entier, et même plusieurs secondes après. Complètement perdu, un autre gémissement douloureux s’échappa d’entre ses lèvres, ses yeux toujours fermés, ses poings serrés, ses genoux traînant directement dans une de ces maudites flaques de boue. Ses poings retombèrent au sol devant lui et il ouvrit enfin les yeux, son dos, courbés, se redressant au rythme de sa respiration accélérée. Qu’avait-elle fait ? Comment avait-elle réussit à faire ça ? Comment pouvait-elle savoir ? « Un animagus ?! » Il redressa alors la tête, soufflant toujours aussi douloureusement, son regard se posant directement vers la voix – la jeune femme, à présent cachée derrière un arbre, qui le regardait l’air abasourdie et les yeux ronds comme des billes. Il fronça les sourcils et se redressa soudainement, comme embarrassé, se remettant difficilement sur pieds et secouant la saleté – collantes – à ses genoux. Il ravala sa salive. Comment était-ce possible ? Comment… il ne savait même pas que c’était possible. Comment avait-on pu lui cacher cette information ? En même temps, les seules personnes sachant qu’il était animagi étaient celles qui se devaient de le savoir. Il n’y avait aucun cours à suivre. Seulement une maîtrise extrême de soi. Ce qu’il avait appris seul. Lorsqu’elle se cacha derrière l’arbre, il grogna à nouveau et engagea le pas vers l’arbre derrière lequel elle se cachait, une sorte de rage s’imprimant dans sa démarche. Il contourna l’arbre et attrapa le collet de la jeune femme pour ne pas qu’elle bouge. Il n’avait absolument pas tendance à être violent avec les femmes. Cette fois, seulement, c’était différent. C’était la chose la plus douloureuse qu’il n’ait jamais vécu. D’autant plus qu’en y réfléchissant – même si, réfléchir, présentement, ce n’était pas la chose qu’il faisait le mieux – elle venait de découvrir le secret qu’il se tuait à cacher depuis déjà au moins la moitié de sa vie. Jusqu’à maintenant, ça avait été un secret. Il approcha son visage du siens pour lui parler d’un ton grave, mais bas. « Comment est-ce que t’as fait ça, hein ? Comment est-ce que tu savais ? Tu sais que c’est très douloureux tout ça ? Tu le maîtrise ce sort, au moins ? Nan parce que j’ai cru que tu voulais me tuer un instant, là. »

Il soupira brusquement et la relâcha, se retournant pour marcher dans le sens inverse, d’un pas toujours aussi brusque. Sa seule envie, là ? Rentrer au château. Se laver. Se laisser tomber dans son lit. C’était comme si, soudainement, son énergie était entièrement consumée, tout ça en moins de trente secondes. Il atteignit d’ailleurs la sortie du cimetière en peu de temps, ne remarquant qu’à peine la jeune femme qui courrait derrière lui pour rattraper son pas rapide. La colère devait lui monter à la tête. Rien ne comptait plus autour de lui. Colérique ? Un peu, oui. Peut-être beaucoup, en fait, mais ce côté de lui ressortait rarement. Cette fois, par contre, ça avait été suffisant pour faire sortir la bête. Normal, en même temps. Lorsqu’il sentit une main se poser contre son bras, il se retourna rapidement et attrapa le poignet de la jeune femme avant même qu’elle ne prononce un mot, une seule syllabe. Il la toisa du regard. « Qu’est-ce que tu me veux ? »

« Ne me fait pas mal. » Un rictus lui vint automatiquement. Ne pas lui faire mal ? Qu’est-ce qu’elle venait de faire, elle ? Ne venait-elle pas de lui faire mal ? Cela dit, cette demande était ridicule. Il la laissa se défaire de son emprise sans faire beaucoup d’efforts, du moment qu’elle ne tentait pas de l’agripper comme elle avait voulu le faire, il ne lui toucherait pas, de toute façon. « Je veux juste que tu répondes à mes questions. » Répondre à ses questions… il y avait des bouquins, pour ça, non ? Et puis, si elle connaissait un sortilège pour l’obliger à se transformer en humain à nouveau, ça devait forcément être qu’elle en connaissait déjà un minimum à propos des animagus. Il ne répondit rien, la fixant simplement avec ce même regard presque méprisant, presque haineux. Et tandis qu’un silence s’installait entre les deux, un éclair transperça le ciel, attirant son attention. Il leva soudainement la tête, écoutant le tonnerre qui résonna douloureusement dans ses tympans. Puis la pluie sembla soudainement se transformer en averse et un long frisson désagréable courra le long de son échine. Il ferma les yeux une seconde avant de baisser la tête pour reporter son attention vers la jeune femme, tentant de garder son sang-froid. Parce qu’en premier lieu il était énervé et qu’ensuite, la pluie qui le trempait à présent lui donnait une seule envie. Rentrer au château, bien sûr. L’eau. Ce qu’il détestait l’eau. Les gouttes glissaient le long de son visage, s’arrêtaient à ses lèvres ou terminaient leurs chemins au creux de sa nuque et dupliquaient ses frissons désagréables. Lorsqu’elle lui affirma être en position de pouvoir, il haussa un sourcil, un rire dégoûté s’échappant d’entre ses lèvres. Du chantage ? Elle lui faisait vraiment du chantage ? Parce qu’il avait le temps pour les gamineries, bien sûr. Il grogna et tourna à nouveau le dos à la jeune femme pour poursuivre sa marche rapide, la laissant le suivre sans réagir cette fois, peut-être un peu plus ronchon. « Je veux que tu me dises tout ce que tu sais à propos des animagus. Pourquoi le cacher ? » Pourquoi le cacher ?

Voilà pourquoi il n’aimait pas répondre à ce genre de questions. Un vague souvenir, amer, lui revint en tête et il dut cligner des yeux une fois, deux fois pour s’en débarrasser. Pour s’échapper du reste du monde. Pour avoir la paix au moins un peu. S’il avait des tendances félines, ce n’était pas pour rien. Après avoir passé tant de temps dans le corps du félin qu’il était, il était normal qu’il en ait prit les habitudes. S’il aimait tant cacher la vérité, c’était parce que comme ça personne ne l’embêtait. Comme Soo Jin. Un long soupire fit lever son torse et il s’arrêta soudainement, la jeune femme lui fonçant presque dedans après la course qu’il venait d’entreprendre. Il resta immobile de longues secondes avant de finalement se retourner vers elle, l’air un peu plus calme cette fois parce qu’il avait pris le temps de respirer. Elle n’avait tout de même pas tort, elle l’avait sauvé, et cette fois il ne pouvait pas dire qu’il ne lui avait pas demandé parce que c’était exactement ce qu’il avait fait. Toutes les nuits passées sur le toit, les nuits où il sortait sans se faire réprimander. Les fois où il n’avait eu de retenue parce que, justement… personne ne savait. Qu’est-ce qui lui disait qu’elle n’allait pas le dire de toute façon, même s’il répondait à ses questions ? Au final, il ne perdait rien. Il croyait. Il espérait du moins. Il passa lentement sa main contre son visage, se débarrassant de l’eau qui y ruisselait. On aurait dit un film d’horreur avec ce décor macabre de cimetière. Il prit enfin une grande respiration et parla, répondant à sa première question par une question en retour. « Qu’est-ce qui me dit que tu ne vas pas aller le raconter à tout le monde quand même ? J’te connais pas, et inversement, toi non plus. »

Malgré tout, après avoir passé sa langue contre sa lèvre supérieure et avoir regardé au loin, comme s’il cherchait une issue – pas possible – il réfléchit. Comment pouvait-il lui répondre à ça, au fond ? Il n’allait pas non plus lui raconter sa vie. D’ailleurs, il détestait répondre aux questions. Généralement, il se contentait simplement de répondre le nécéssaire sans en faire trop. Une phrase de trois mots qui voulait tout dire plutôt que dix phrases qui se résumaient en ces trois mots lui suffisait parfaitement. « Je sais pas. » Il y avait tout de même mieux comme réponse. Il haussa les épaules et hocha négativement la tête, son regard revenant se poser vers celui de la brune, de longues secondes se passant en silence avant qu’il ne parle à nouveau. « La liberté de pouvoir faire ce que je veux. J’imagine. Pourquoi tu veux savoir tout ça ? Y’a des bouquins là-dessus. Comment penses-tu que j’ai appris à le maîtriser ? Ça ne vient pas naturellement, comme toute autre chose. » Il baissa la tête et farfouilla dans ses poches. Maintenant, au final, il était hors de question de rentrer au château, même si les deux devaient mourir de froid à cause de la pluie. Surtout qu’ils étaient trempés. Il avait fait humide et chaud toute la semaine. Lorsque c’était utile, par contre, il ne faisait pas beau. Il tira sa baguette de sa poche arrière et lui fit signe de s’approcher jusqu’au prochain banc. Là, il leva sa baguette dans les airs et murmura un faible protego, presque inaudible. Un faisceau de lumière apparut et une sorte de bouclier contre la pluie se plaça au-dessus d’eux, invisible. On pouvait le détecter seulement par les gouttes qui y atterrissaient pour glisser le long de ce dernier et donc ne plus les tremper. Il secoua la tête et essuya à nouveau son visage avant de s’asseoir sur le banc, tournant la tête vers l’autre. Qui était-elle ? De quelle maison, quel âge, son prénom ? Était-elle plus jeune ou alors plus vieille que lui ? « La prochaine fois, réfléchit avant de lancer un sort sur un animal… c’est douloureux. »

Il avait tourné la tête vers la jeune femme, remarquant la distance qu’elle gardait entre les deux. Il préférait toujours ça qu’elle ne se colle à lui. Surtout en ce moment, puisqu’il était trempé jusqu’aux os. Pas besoin d’en rajouter, hein. « Moi, c’est du précis que je veux. » A quoi s’attendait-elle de sa part ? Ce qui n’était pas dans les bouquins n’importait que peu. Chaque animagus avait sa motivation personelle et elle pouvait demander à n’importe quel d’entre eux que les réponses ne seraient jamais les mêmes. Au final, c’était un peu inutile. Du moins, c’était son point de vue à lui. Il fallait tout de même ajouter le fait que ses questions l’emmerdaient et qu’il détestait parler. Détestait devoir révéler ses secrets. Détestait encore plus parler de lui-même, parce qu’il ne le faisait jamais, ne l’avait jamais fait et ne comptait pas du tout le faire encore maintenant. Cela dit, il n’avait pas le choix, présentement, parce que c’était tout ce qu’il avait qu’elle mettait en jeu malgré lui. Du chantage. Quelles gamineries. Qu’est-ce qu’il en était de son espace vital, de son intimité, hein ? Il n’allait pas faire chier les gens en leurs posant des millions de questions, lui. S’il n’était pas le plus doux et le plus gentil des garçons, il n’était pas le plus chiant d’entre eux dans tous les cas. Il ne répondait pas à ses excuses, se contentant de fixer le vide devant lui. C’était exactement pour ça qu’il n’était pas permis d’utiliser des sorts sur les autres êtres vivants du château. Parce que tous les élèves ne savaient pas forcément les conséquences que chaque sort pouvait amener à une autre personne… elle répondait donc d’elle-même et il n’avait rien à ajouter. Un long silence passa à nouveau. Il n’aidait pas et ne comptait pas aider la jeune femme. Si elle pensait réellement qu’il allait parler de lui-même elle se trompait, et beaucoup. Si elle le percevait comme froid, distant et méchant, c’était qu’elle se trompait. Mais ils le faisaient tous. Juger sans connaître. Indifférent. C’était tout ce qu’il était. Lorsqu’elle se présenta, il tourna simplement la tête vers elle, la dévisageant toujours. « Alors ne soit pas surpris par mes connaissances quelques peu poussées. » La cerise sur le gâteau… tous les mêmes, n’est-ce pas ? Sans réellement savoir pourquoi, cette dernière affirmation l’avait exaspéré. Un sourire moqueur était venu dessiner ses lèvres et il se laissa retomber contre le dossier du banc, ses coudes se posant sur ce dernier alors qu’il continuait de la dévisager. Visiblement, elle voulait qu’il se présente à son tour. Il soupira et baissa la tête, hochant négativement, ne cachant pas à quel point la situation l’embêtait profondément. « Kessy. Bientôt vingt ans. Ineo. » Il redressa la tête et haussa un sourcil. « Alors tu peux être surprise par mes connaissances très poussées… j’imagine. »

Il laissa alors sa tête retomber vers l’arrière, fermant les yeux. Ce n’était pas parce qu’on n’était pas à Muneo qu’on ne pouvait pas être intelligent ou alors qu’on n’était pas un bon sorcier. D’ailleurs, il était premier de classe, ce n’était pas pour rien. Généralement les gens pensaient que ce n’était pas parce qu’il l’était réellement. Un mois et il était déjà premier de classe. Forcément, Kessy devait faire des trucs louches pour avoir de bonnes notes. C’est lorsqu’il prouvait qu’il pouvait tout faire par lui-même qu’on s’étonnait et qu’on lui demandait son truc. Son truc ? Rien, il n’y en avait pas. il était comme ça et puis c’est tout. Il n’y avait donc aucune question à se poser. C’était naturel. Pour lui, c’était facile de lire un livre une seule fois pour en citer un chapitre presque entier un mois plus tard. C’était donc sa mémoire, qui était imbattable. Et peut-être, également, son habileté. Être un félin avait de bons côtés. Ça emmenait la ruse. Et l’habileté, justement. La grâce et peut-être la délicatesse et la patience d’effectuer les choses comme elles se devaient de l’être. Il soupira lorsqu’elle parla à nouveau, baissant finalement la tête pour la regarder en signe de résignation. D’accord, il comprenait tout ce qu’elle lui demandait. Mais si elle était un peu plus précise, aussi, il ne perdrait pas son temps à l’écouter parler et parler des heures de temps pour répondre à une question toutes les dix minutes. Elle gaspillait son temps. Certes, la colère descendait doucement, mais Kessy n’en restait pas moins une des personnes les moins sociables que l’on puisse rencontrer dans cette académie. Il avait plus souvent parlé à des chats qu’à des êtres humains, plus souvent touché à des chats qu’à des femmes – sans sous-entendu suspicieux. Il pinça les lèvres et cligna des yeux, tentant de se remémorer de A à Z comment toute cette histoire avait débuté. Le jour où il avait découvert avoir les capacités et le – talent – de devenir un Animagus. Parce que le plus important à savoir était qu’être Animagus n’était pas un don qu’on obtenait à la naissance. Être Animagus c’était quelque chose que l’on apprenait. Difficile à apprendre. Il fallait avoir les nerfs et les capacités de le faire. Ce n’était définitivement pas tous les sorciers qui y arrivaient. Il haussa alors les épaules.

« Qu’est-ce que tu veux savoir, exactement ? Ça ne s’explique pas. Il faut le vivre pour être capable de le savoir. Définir une transformation Animagus ça ne se fait tout simplement pas. » Sa langue glissa contre sa lèvre et, agacé. Il fit une pause avant de poursuivre. Ce qu’il détestait parler, n’empêche… « Je peux communiquer avec les chats. Je sais voir dans le noir, chasser, et tous pleins de détails particulièrement associés aux félins. J’utilise ce pouvoir pour m’échapper des gens – comme toi – qui posent trop de questions et qui m’embêtent… je ne sais pas, moi, ce que tu sais ou ne sais pas. Je peux pas te dire. Qu'est-ce que ça peut te faire, au fond ? »

« Pourquoi avoir choisi d’être un chat plutôt qu’un cerf ou loup, par exemple ? Parce qu’ils te fascinent ou… parce que tu leur ressembles ? »

La réponse lui semblait pourtant évidente. Le chat était certainement l’animal qui le représentait le plus. C’était un animal rusé mais surtout manipulateur. Kessy n’avait pas besoin de manipuler les gens pour arriver à ses fins – il se faufilait sous l’apparence d’un chat et tout allait bien. Il n’avait pas besoin de travailler pour avoir ce qu’il voulait et même si le vol était mal, il lui était arrivé plusieurs fois de profiter de câlins en échange de quelques billets volés. Personne n’aurait réellement pu deviner qu’anciennement, il faisait partie d’un de ces nombreux gosses de riches un peu trop frimeurs à le voir errer dans les rues, chat de gouttière, pauvre imbécile. Maintenant, il s’en fichait. C’était bien une des leçons qu’il avait appris, au cours de sa vie, ça. L’argent, c’était rien. La famille, elle, bah… on apprenait à se débrouiller sans. De toute façon, sa famille au grand complet, pour lui, n’importait plus du tout. Sa mère, son père, ils n’avaient même plus une seule petite place dans son cœur. Après tout, c’est eux, qui l’avaient brûlé de l’arbre généalogique et, plutôt que de l’aider à se sortir de la merde et à se remettre sur pieds, l’avaient envoyé en Amérique, seulement pour ne plus voir sa gueule. Cinq ans. Et il s’était finalement fait expulsé pour revenir à la case départ. Sa langue claqua contre son palais, toujours aussi visiblement agacé par les questions qui l’obligeaient à revenir sur des souvenirs qu’il avait longuement tenté d’oublier. Il soupira et se calla contre le banc, ses mains se posant au bas de son ventre et ses doigts s’entremêlant l’un à l’autre. Il haussa les épaules. « J’imagine que les chats me ressemblent, oui. » Fut sa seule réponse, et il préféra ne donner aucune indication ni aucune précision sur la « ressemblance » en elle-même.

« Tu sais, si je t’embête autant, pourquoi tu ne te transformes pas en chat pour décamper ? De toute façon, je ne semble pas t’intéresser plus qu’il le faut… » Il hocha négativement la tête. Elle ne comprenait rien. Elle l’avait elle-même menacé de révéler son secret – non ? Il ne se trompait pas, sur ce coup-là. S’il y avait bien une chose importante pour lui c’était que ce secret reste… un secret. C’était son seul échappatoire et si quelqu’un le lui enlevait, c’était le gouffre. Il ne lui restait plus qu’à se jeter en bas des toits de l’école, ça ferait le même effet. Dans toute sa réflexion, il n’eut pas le temps de lui répondre qu’on entendait des pas venir vers eux. Il leva la tête seulement lorsqu’il aperçut la panique dans les gestes de la plus jeune, levant la tête vers l’endroit d’où venaient les pas. Chez lui – pas une once de panique. Après tout, il était habitué et maintenant, il s’en fichait pas mal. Ça lui prenait deux secondes et le tour était joué. On n’y voyait que du feu. Un pauvre petit chat perdu dehors, ou errant, peu importe. C’était bien pour ça qu’il avait voulu le dire uniquement au Directeur. Et ce dernier n’avait pu contester son droit de garder secret certaines informations personnelles. Il réalisa donc au bout de quelques secondes, à retardement, que Soo Jin, elle, ne pouvait s’échapper aussi facilement que lui. « Merde ! » Il mordilla l’intérieur de sa joue et resta immobile de longues seconds avant de soupirer, se redressant pour se lever à son tour. Elle l’avait sauvé et elle promettait de garder son secret. Il lui devait au moins ça, pour s’assurer qu’elle n’irait pas le raconter à tout le monde. En général, il n’était pas le garçon le plus juste ou alors le plus fidèle, que ce soit en amitié ou simplement en relation humaine. Il était fourbe, on le savait. Mais il savait délimiter lorsqu’il se devait de rendre un service. Elle ne lui avait rien demandé – et probablement pensait-elle qu’il allait s’enfuir d’une seconde à l’autre et la laisser dans la merde. Il soupira et lui fit signe d’aller se cacher derrière l’arbre. Elle ne sembla pas comprendre son geste sur le coup mais il insista, lui pointant l’arbre. Lorsqu’elle fut cachée, il se transforma en chat, ne laissant plus aucune trace de sa forme humaine sauf peut-être les empreintes de ses pas que les professeurs ne verraient pas de toute façon. Il se faufila rapidement au travers des tombes pour se rendre à son entrée, où les professeurs s’étaient arrêtés, probablement parce qu’ils avaient entendu des bruits de la part des deux jeunes. Il fit donc exprès de faire le plus de bruits possibles en arrivant et lorsque ses yeux, brillants dans le noirs, furent visibles aux yeux des deux professeurs qui faisaient leurs rondes, un sourire apparut sur leurs visages. Un jeu d’enfant, que de charmer de pauvres humains…

Cela ne prit que quelques minutes, le temps qu’il réussisse à les écarter du chemin. Des câlins et encore des câlins. Autant aimait-il les câlins de la gente féminines, ceux de vieilles professeurs rabougries, elles, il ne les appréciaient pas trop – alors, elle avait de quoi le remercier, là. Entre temps, il avait indiqué – non sans difficulté – à la jeune femme de suivre ses pas tout en restant camouflée de la vue des professeurs. Lorsqu’ils furent entrés au château, il revint vers elle, venant se coller à sa jambe pour lui faire comprendre qu’ils étaient partis. Puis il lui fit signe de le suivre – le château n’était plus bien loin, maintenant. Il ne pouvait pas réellement communiquer avec elle mais arrivait, à l’aide de signes de tête, à lui dire quoi faire. Et lorsqu’ils furent tout prêt du château, il la fit patienter prêt d’une fenêtre avant de grimper sur celle-ci. Elle n’était pas ouverte, il fut donc obligé d’utiliser ses « talents » de grimpeur pour monter à la fenêtre supérieure où il se faufila. Une salle commune, ah, merveilleux. Il se dépêcha de sortir de la pièce pour courir jusqu’à la fenêtre du dessous. Si il ne revenait pas le plus rapidement possible, elle croirait certainement qu’il l’avait abandonné. Au bout d’un peu moins de cinq minutes, il fut soulagé de voir que la jeune femme l’attendait toujours patiemment à l’extérieur. Ce fut donc sous sa forme humaine qu’il tendit une main à l’extérieur, toujours cet air exaspéré au visage, les lèvres pincées. Il lui fit signe d’entrer et lui demanda de se dépêcher – il ne pouvait rester là deux heures, non plus, autrement il allait se faire prendre la main dans le sac lui aussi. Lorsqu’elle attrapa sa main, il lui tendit l’autre pour l’aider à se glisser à l’intérieur du château – heureusement qu’elle était légère, d’ailleurs, parce que ce n’était pas chose facile… « Maintenant tu peux dire que je t’ai rendu la pareille… »

Sa réponse avait été simple, neutre, sans grande conviction. Mais il n’en demandait pourtant pas plus. Il l’avait aidée à entrer dans le château sans dire un mot, la laissant s’appuyer sur ses épaules lorsqu’elle en avait eu besoin et l’aidant même à reprendre son équilibre lorsqu’elle vacillait dangereusement. Puis il avait glissé ses mains dans ses poches, observant le paysage à l’extérieur. Maintenant qu’il s’était calmé, le courant passait déjà mieux. Il avait dû se le dire plusieurs fois, mentalement, que ce n’était pas de sa faute pour se calmer. Il n’était pas particulièrement colérique – ou, du moins, il ne montrait pas souvent sa colère et avait tendance à se parler à lui-même dans sa tête pour se calmer et donc ne pas éclater. Cela dit, le jour où sa « vraie » colère éclaterait, ça ne serait pas joli joli… même lui le savait, même s’il le déniait. Lorsqu’elle s’était dirigée vers la porte en affirmant qu’ils n’avaient pas le droit d’être ici, il avait simplement haussé les épaules après quelques secondes de réflexion pour la suivre. Après tout, mieux valait éviter la retenue. Quoi que, lui, il n’avait pas vraiment de problème sur ce point-là, encore une fois. Ce qui expliquait la raison pour laquelle il n’était jamais prudent et également la raison pour laquelle il ne voulait que personne ne sache son secret. Autrement, Adieu la paix, Adieux les escapades de nuit. L’horreur, en résumé. Il l’avait donc suivit sans dire un mot de plus et dans les couloirs, il était à l’affut de tous les bruits. C’était connu. Les félins avaient une bonne vision, autant de jour que de nuit, et captaient les sons mieux que les humains dans tous les cas. C’était là qu’on comprenait pourquoi il était l’attrapeur de son équipe de Quidditch. Entre temps, ils avaient échangé quelques paroles, pour passer le temps, sûrement. Il ne savait pas trop non plus où ils allaient mais comme ce n’était pas très prudent de traîner dans les couloirs à cette heure, Key s’était fait à l’idée que retrouver un dortoir serait le plus prudent, pour là. Et comme ils étaient au rez-de-chaussée, en ce moment… mieux valait se diriger vers les cachots, surtout que, là, les professeurs ne s’y aventuraient que très rarement.

Dans la pénombre des cachots, Kessy se débrouillait parfaitement, il ne fut donc pas étonnant de le voir prendre les devants. Il marchait calmement, les mains dans les poches, mais avait tout de même prit un pas d’avance sur la jeune femme. Ils retrouvèrent donc assez rapidement la salle commune d’Ineo, notamment le dortoir des garçons et puis finalement sa chambre. Ce soir, les garçons de sa chambre n’étaient pas là. Il se rappelait vaguement s’être fait inviter à une petite fête dans la chambre du fond, où quelques amis étaient invités, quelque chose de simple mais quand même trop pour lui. Il s’était d’ailleurs dit que ce soir, au moins, il aurait la paix. Bah, pas tout à fait. Mais au moins, ça tombait le bon soir et comme ça, Soo Jin pouvait rester… « Ravie de t’avoir raccompagnée... »

Il s’était déjà laissé retomber dans son lit lorsqu’elle avait parlé. Il redressa la tête et haussa un sourcil. Elle partait, déjà ? N’était-ce pas un peu imprudent, surtout dans les cachots à cette heure-là ? Il soupira et se redressa pour s’asseoir. Mais avant de n’avoir pu l’avertir de quoi que ce soit, son regard fut attiré par une chose qui rampait le long du sol froid. Il écarquilla les yeux lorsqu’il vit le pied de la jeune femme qui s’approchait dangereusement de son serpent, prêt à l’écraser à tout moment, puis se redressa, visiblement alerté. « Soo Jin. » Sa main se posa contre son épaule et il la retint dans sa lance, la faisant basculer vers lui. Il pointa le sol pour lui montrer le serpent noir aux reflets bleus, au sol, tout prêt de sa chaussure, puis il hocha négativement la tête. « Fais attention où tu mets les pieds, tu veux ? » Il soupira à nouveau et la relâcha brusquement, se reculant d’un pas ou deux, laissant la jeune femme vacillante devant lui parce qu’il avait été brusque un peu – mais pas violent, que cela ne tienne… il passa une main dans ses cheveux et cligna des yeux. Définitivement, il était la pire des nullités dans tout ce qui touchait les relations humaines. Au fond, il avait peut-être envie qu’elle reste, parce que pour une fois, il ne passerait pas sa soirée seul ou alors sa nuit seul. Mais ça il ne se l’avouerait jamais. Il aimait sa solitude, il aimait être seul, il n’appréciait pas le contact humain et tous les problèmes que ça emmenait… certes, parfois, par contre, il aimait bien être accompagné et particulièrement d’une jolie dame, comme celle qui se retrouvait avec lui en ce moment. Ses lèvres se pincèrent l’une contre l’autre et il leva la main vers la porte, entrouvrant les lèvres pour parler mais abandonnant finalement et laissant retomber sa main le long de son corps. Autant être franc, net et précis, alors. « Non mais je m’étais dit que tu pouvais dormir ici cette nuit. » Il marqua une pause pendant laquelle il réalisa que ses mots pouvaient être remplis de sous-entendus pas très sains. Il retint un grognement.

Définitivement, définitivement. Il était le pire. Il s’empressa donc d’ajouter la suite. « Je veux dire que c’est pas très prudent d’aller vers ta salle commune maintenant. Ta salle commune se trouve au quatrième étage, tu as donc cinq étages à grimper avant d’y arriver. Tu as donc amplement le temps de te ramasser cinq retenues d’ici à ce que tu y soit rendue. Ici tu crains rien, puis les autres garçons sont partis pour la nuit… » Il se racla la gorge. « Cela dit, comme nous étions au rez-de-chaussée, je me suis dit que les cachots étaient les plus prêts. Bon, vas t’en si tu veux, c’est toi qui vois… mais j’aurais pensé qu’une Muneo saurait faire un choix judicieux sur ce point-là. »

« Dé..désolé. Je n’aime pas les serpents. » Vraiment ? Avait-il envie de dire, alors que la jeune femme se jetait littéralement dans ses bras pour éviter Dopey. Il aurait été plutôt étonné qu’elle affirme le contraire, de une parce qu’elle avait gémit de peur et s’était jetée dans ses bras, de deux, parce que les personnes affirmant aimer les serpents étaient relativement rares. Surtout ici, en fait, ce qui était plutôt ironique au final dans ce monde. Il y avait tellement de créatures beaucoup plus effrayantes que ce pauvre serpent… il hocha lentement la tête, pinçant les lèvres, sans vraiment répondre. Il se contenta de lui adresser un mince sourire, amusé, la reposant pieds au sol avant de se pencher pour prendre le serpent noir et aller refermer la porte. Il la poussa du bout de sa chaussure et glissa le serpent autour de son cou, se tournant vers la brune. C’était ironique qu’un chat et un serpent puissent bien s’entendre, quand même. Et pourtant, même sous sa forme féline, il pouvait passer des heures à simplement dormir tout prêt de son serpent et être tout de même heureux au bout du compte. Dopey était son inconditionnel ami. Si on venait à lui faire du mal, il serait probablement plus peiné que si c’était n’importe lequel de ses proches « humains », Kyung Jee mis à part, bien sûr. Mais ça, personne ne le savait , pas même Kyung Jee au final. Il observa les joues de la jeune femme se gonfler puis tourna la tête. Pourquoi était-elle si mignonne, en fait ? Il n’arrivait même pas à lui en vouloir d’envahir son espace de la sorte. Il lui avait même, lui-même, proposé de passer la nuit avec lui, après tout. Et cette idée lui semblait drôlement bête après réflexion mais pourtant…

« Tu me surprends. Mais je veux bien rester avec toi, Key. » Key. Voilà bien longtemps qu’on ne l’avait pas appelé de la sorte. La dernière fois remontait à ses derniers jours en Amérique. Personne, ici, n’avait encore réellement utilisé ce surnom. Enfin, si, mais pas vraiment – Jae Hyun, peut-être, à la rigueur. Mais c’était venu naturellement de la part de la jeune femme, apparemment, et il avait redressé la tête vers celle-ci avant de la rejoindre dans le lit sur lequel elle s’était assise. Le siens. Il sourit à nouveau lorsqu’elle se rattrapa et baissa la tête. Les gens, ici, avaient réellement pris l’habitude de le prendre pour un méchant, de toute façon. Pas que ça lui déplaisait et, au fond, il ne faisait rien pour ne pas entretenir cette réputation, puisque ça lui permettait d’être en paix en général, comme les gens ne l’approchaient pas réellement. Mais, au fond, pouvaient-on réellement dire qu’il était si méchant que ce que l’on croyait ? Il hocha doucement la tête et reposa son regard vers elle. « Tu peux m’appeller Key. »

Ses réponses étaient toujours aussi simples. Suffisantes, comme on dirait. Il n’avait pas tendances à inviter des gens à dormir avec lui la nuit, pas même lorsqu’il était en Amérique, à vrai dire. Les seules fois où quelqu’un avait dormi avec lui, c’était certainement pour une histoire d’un soir, et même encore – il n’avait pas tendance à laisser dormir les gens chez lui. Il était ce genre de personnes froides qui ont besoin de leur espace et qui n’ont que rarement envie de tisser des liens avec les autres. Il avait pour idée que ça ne servait à rien. Tout comme un chat n’aime pas se faire apprivoiser, n’aime pas être dans les bras d’un humain à moins que ça ne soit son maître – le vrai de vrai. Le seul auquel il serait fidèle jusqu’à la fin de ses jours. Et Kessy avait bien un maître. « Tu as souvent invité des gens comme ça, dans ta chambre ? Je veux dire… avec qui passer la nuit. » Il humecta discrètement ses lèvres et mordilla l’intérieur de sa joue, par réflexe. Elle semblait pouvoir lire dans ses pensées, ou, du moins, savoir à quoi il pensait sur le moment et c’était plutôt ironique qu’elle lui pose cette question maintenant qu’il avait fait ses réflexions sur la question. Il posa son serpent au sol et ce dernier glissa entre les pattes des lits, disparaissant sous un des dits lits. Puis il reporta son attention vers Soo Jin, haussant les épaules. « Qu’est-ce que tu veux dire, par là ? Si j’invite souvent des femmes à « coucher »… ou simplement des gens ? » Il haussa un sourcil, amuse. Dans tous les cas, c’était négatif, mais c’était toujours drôle, ce genre de sujets. Les femmes, surtout coréennes, en fait, n’était pas très à l’aise avec ce genre de sujets. N’est-ce pas ? Il se laissa retomber contre son lit, derrière la jeune femme, et glissa ses bras sous sa tête sans dire un mot de plus, fermant les yeux, soupirant. Il laissait le sujet en suspens, juste pour laisser Soo Jin se poser des questions. De toute façon, qu’elle en pense ce qu’elle voulait. Au bout du compte, il ne lui ferait pas de mal, et il le savait. Juste histoire de voir sa réaction.

« C’est le tien ? Promet-moi de ne pas laisser ton SERPENT libre durant la nuit. » Il ouvrit alors les yeux et cligna des paupières, légèrement abasourdi par ce qu’elle venait de dire. Il hallucinait. Carrément. Qu’est-ce qu’elles avaient toutes ? Leurs mères ne leurs avaient pas appris à faire attention à leurs paroles ? À agir en présence d’un homme ? Il allait devenir fou, complètement. Deux vélanes, une féline en chaleurs et maintenant, Soo Jin, avec ses paroles bêtes. Dieu en avait après lui, ou Bouddha, peu importe qui c’était mais dans tous les cas, quelqu’un lui en voulait. Il s’étouffa presque avec sa salive et dû se racler la gorge, tournant la tête vers la brune, silencieux plusieurs longues secondes. Réalisait-elle le sous-entendu qu’il y avait dans tout ça ? Surtout après ce qu’il venait de dire, hein, ce n’était pas les paroles les plus saines qu’elle pouvait trouver. Il soupira et posa une main contre son front, inspirant profondément. Fou, il allait le devenir, vraiment. « Soo Jin… repense à tes paroles. Pense et fais attention à ce que tu dis, surtout lorsque tu t’adresses à un homme. Pense. Mon serpent libre durant la nuit ? mh. »

Jinnie. Voilà comment il allait l’appeler, il préférait et c’était beaucoup moins long. Il savait déjà que les Coréens étaient relativement pudique, qu’ils n’aimaient pas réellement les touchers et que certains sujets étaient toujours très tabous chez eux. Cependant, il ne pouvait s’en empêcher. Par moments, c’était si drôle de se moquer – gentiment – d’eux. Enfin, il savait tout de même ce que c’était. Imaginez lorsque lui était arrivé en Amérique. C’était excitant, mais les gens étaient relativement insultants par moments. À la longue, il avait fini par s’habituer et lui-même prendre les habitudes de ceux-ci. Serrer la main de quelqu’un, lui toucher la tête ou alors le regarder directement dans les yeux, ça n’avait rien d’impoli pour lui ; c’était même plutôt normal. Parfois, il ne faisait même pas attention, justement. L’avait-il gêné en étant trop direct ? Et pourtant, ses paroles avaient été assez banales. Rien de très extravagant ou alors rien de très… « explicite », dirons-nous. Malgré tout, après avoir ignoré sa question pour la laisser en suspens, il ne pouvait s’empêcher de garder ce petit sourire amusé tandis qu’elle semblait réaliser ce qu’il voulait dire par un sous-entendu. Ah, la voilà qui devenait gênée. Ce n’était plus la jeune femme si caractérielle qu’il avait rencontré au cimetière un peu plus tôt, n’est-ce pas ? Et pourtant… elle n’en était que plus mignonne. Il devait se débarrasser de cette idée. « je ne voulais pas insinuer ton… ta… » Il suivit des yeux le regard de la jeune femme vers son entrejambe, haussant un sourcil. Qu’y avait-il de si difficile à dire ce mot, ou alors simplement dire les vraies choses ? Bon, après tout, lui, ça faisait prêt de vingt ans qu’il vivait avec « ça, cette chose là, ce… » forcément, qu’il était habitué. Il vivait avec depuis sa naissance. Alors il n’y avait rien de gênant, là-dedans. Encore, c’était une femme. Mais en prenant l’exemple inverse, il n’avait pas de mal à discuter de l’anatomie féminine, et au contraire. Surtout pas lorsque quelque chose vous plaît, hein. « pas ce qui se trouve dans… enfin sous ton jean. » Il humecta ses lèvres et resta silencieux, ne sachant pas réellement ce qu’il pouvait lui répondre au final. Est-ce que ça valait réellement la peine, de la gêner encore plus qu’elle ne l’était présentement ? Il n’avait pas vraiment envie d’être méchant, avec elle, au fond.

Enfin, ça… c’était jusqu’à ce qu’elle n’en rajoute une couche. N’était-elle pas maladroite, un peu ? Pourtant, il tilta lorsqu’elle lui affirma « aimer les serpents mâles », son sourire lui revenant rapidement. Ça aussi, ça sonnait drôlement pervers. Il pouvait facilement l’interpréter d’une certaine façon et en penser qu’elle devait en connaître beaucoup au sujet de ces dits « serpents », pour dire qu’elle les aimait. Ou alors, elle n’y connaissait toujours rien. Cela dit, ça se transformait donc en fantasme, non ? Eh bien, si elle prétendait être innocente, elle ne devait pas l’être totalement pour penser à ce genre de choses. Stéréotypes, oh oui, il y en avait. Il se redressa alors légèrement, s’appuyant sur un coude pour se tourner un peu vers elle, visiblement pas du tout mal à l’aise avec la situation ou alors les paroles de la brune. Ses doigts dégagèrent les quelques mèches qui retombait dans son visage et il posa un index sous son menton pour lui faire tourner lentement la tête vers la sienne, haussant un sourcil toujours aussi amusé. Il observa ses joues rosées une seconde avant de poser son regard dans le siens, sa main retombant contre le lit. « Hm, Jinnie.. tu es toute rouge. » Il se recula légèrement, juste histoire de reprendre ses distances pour ne pas trop la gêner. Après tout, il ne voulait toujours pas être méchant avec elle. Tiens, après, il se ferait pardonner et irait aux cuisines chercher ce qu’elle avait envie de manger – n’importe quoi, ce qu’elle voulait. Ce n’était pas une mauvaise idée, non ? Cela dit, il lui fit tout de même signe de se rapprocher, à elle de décider ce qu’elle préférait après. Si elle voulait se coucher tout prêt de lui ou alors garder ses distances. Il comprendrait de toute façon, clair qu’il avait l’air d’un gros pervers, comme ça. Il lui prouverait que ce n’était pas le cas plus tard, sinon.

Soo Jin sembla hésiter un moment mais se coucha finalement à ses côtés, sa tête tout prêt de son épaule, et il pinça les lèvres. Il se doutait bien qu’elle n’était pas homosexuelle. Autrement, elle aurait certainement réagit d’une façon beaucoup plus violente. Et honnêtement, est-ce que ça l’aurait réellement dérangé ? Quel homme ne fantasmait pas à l’idée de deux femmes ?Pour ça, il ne se sentait pas dérangé. Il n’était effectivement pas uniquement porté sur le sexe ou quoi que ce soit, mais il avait des envies et des fantasmes, comme tout le monde, ça, on ne pouvait pas le dénier. D’ailleurs, pour preuve, il y avait déjà presque une année complète qu’il n’avait rien fait. Ce n’est pas n’importe quel homme qui le ferait, sans y trouver une anormalité. Mais ça, c’était dans le gêne masculin. Forcément. Il passa son bras autour de ses épaules et l’approcha un peu plus à lui. Il n’aimait pas vraiment les rapprochements ou alors la présence des gens, mais il ne fallait pas non plus imaginer que c’était un vrai glaçon et qu’il grimaçait dès qu’on s’approchait de lui, hein… il baissa alors la tête pour observer son propre corps. Il n’était pas si gênant que ça, non ? Il savait cependant que ce qu’il s’apprêtait à lui demander allait être un peu flippant pour la jeune femme. « C’est parce que tu es très expérimentée… ou pas du tout, que tu dis ça ? » Même s’il y avait deux possibilités de conclusion, pour le coup, Kessy penchait plutôt pour la seconde. Jinnie ne semblait pas être ce « genre » de fille. Elle semblait plutôt, en toute modestie, n’avoir jamais même expérimenté la chose. Pour ça qu’elle était gênée, non ? « De toute façon tu sais, ça ne peut qu’être flatteur pour moi, ce genre de commentaires. » Non, elle n’avait pas à proprement parlé dit qu’elle aimait le siens. Mais, encore une fois, il s’amusait bien à tourner les mots de la jeune femme de façon à la gêner un peu plus et à son « avantage », si on pouvait le dire comme ça. Il prit donc la main de Soo Jin et la posa contre son ventre, haussant un sourcil. Promis, il se ferait pardonner. Après.

Kessy n’était définitivement pas le genre de garçons méchants qui ne cherchaient qu’à faire ça ; prendre la virginité des pauvres filles qui tombaient sous son charme trop facilement parce qu’elles n’avaient aucune expérience. Ça aurait pu être tentant pour n’importe quel mâle existant sur cette planète, mais pas lui. Il était tout de même une personne respectable en lui-même et n’avait absolument aucune raison d’agir de la sorte. Peut-être avait-il une raison de détester les hommes, mais pas les femmes, elles ne lui avaient rien fait. Et même encore, il ne détestait pas les hommes. Pas tout à fait. Ça n’avait rien à voir avec quelque chose de tragique. Il pinça les lèvres et écouta attentivement ses paroles lorsqu’elle lui avoua ne pas être expérimentée du tout. Ce n’était pas étonnant, pas à ses yeux du moins, même si, dix-huit ans, d’où il venait, ce n’était pas considéré comme très jeune sur le plan sexuel. Ici par contre c’était différent, et il n’aurait certainement pas le culot de dire que c’était mal puisqu’au contraire, les femmes se respectaient beaucoup plus ici qu’aux États-Unis. Forcément, ce n’était pas du tout une mauvaise chose. Il n’avait cependant rien répondu, comme à son habitude. Pour lui, ça signifiait tout simplement qu’il respectait ses propos s’il n’avait aucun commentaire à faire là-dessus. Il n’y avait absolument aucune gêne à être vierge. C’était même plutôt quelque chose qui donnait de la valeur à la jeune femme, du moins pour celui qui prendrait sa virginité. Et celui qui ne le reconnaissait pas n’était pas un bon homme. C’était du moins sa façon de voir les choses. Lorsqu’une femme s’offrait à vous, il ne fallait pas cracher dessus, certes. Mais il ne fallait pas non plus le faire uniquement parce que c’est un compte de plus dans sa liste. Il n’était peut-être pas le plus gentil des garçons, mais il avait ses propres valeurs. Et il respectait les femmes.

Lorsqu’il avait posé la main de Soo Jin contre son ventre, elle semblait tout de suite avoir pris la défense, s’être vexée, peut-être. Il n’avait pas eu l’intention de la vexer, ni rien dans ce sens d’ailleurs. Peut-être que ça avait été un peu trop, au final, mais au départ, ça avait été plutôt drôle que d’imaginer sa réaction. Sa langue se pointa au coin de ses lèvres et il retint un petit sourire. Était-ce tabou à ce point, pour elle ? « Que…qu’est-ce que je dois comprendre à ça ? » Forcément, il n’en déduisait qu’une conclusion. Elle n’avait jamais touché un homme, ni même le plus simple des touchers. C’était encore plus adorable. Ridicule chat. Il n’y avait rien à y comprendre, sauf peut-être une taquinerie qui n’avait aucune limite. Il se retint donc d’en faire plus et la laissa reposer sa tête contre son épaule sans réagir, préférant voir ce qu’elle allait faire plutôt que de faire une connerie, pour le coup. Si elle n’était vraiment pas à l’aise alors valait mieux voir sa réaction et en déduire les bons mots à dire. Mais si elle n’avait réellement pas apprécié, alors, pourquoi restait-elle contre lui, comme ça ? Pourquoi ne s’était-elle pas fâchée contre lui, ne l’avait-elle pas giflé si elle était si offusquée par ce geste ? Contre toute attente, sa main retrouva sa position initiale, contre son ventre, se glissant même un peu plus loin jusqu’à ce qu’elle le serre dans ses bras.

Surpris. Soo Jin n’était pas si facile qu’il l’avait cru à cerner. Était-elle naïve, simplement curieuse ou alors tout à fait ouverte ? Elle ne semblait toutefois pas si sûre d’elle-même et de ses propres gestes, et il en déduit donc qu’elle faisait simplement de son mieux pour contrôler sa gêne. Et que la raison pour laquelle elle avait reposé sa main là n’était simplement que de la curiosité mélangée à, peut-être, un peu de défi de sa part. Personne ne voulait se ridiculiser, après tout. Un silence passa pendant lequel il pensa que c’était peut-être à son tour de dire quelque chose, de finalement se faire pardonner d’avoir été si impoli. Mais la brune fut la première à prendre la parole. « Je me sens toute drôle. » Quoi ? Avait-il bien comprit ? Pourtant, il n’avait rien de spécial, n’est-ce pas ? Du moins, c’était ce que toute sa famille entière s’était tuée à lui dire pendant quinze longues années de sa vie, et il ne l’avait jamais dénié, croyant finalement au bout du compte qu’il n’était qu’un bon à rien dont la vie ne mènerait nulle part. Et ça ne l’avait jamais dérangé, honnêtement. Mais pourquoi, alors, semblait-il chambouler toutes les femmes qu’il touchait ? Que ce soit négatif ou positif, c’était à ne rien y comprendre. Dans tous les cas… il posa sa main contre son épaule, son pouce caressant distraitement la peau nue qu’il pouvait toucher, son regard vide dirigé vers le fond de la pièce. Hm. Il avait eu l’intention de se faire pardonner il y avait de cela à peine trente secondes, mais maintenant qu’elle avait parlé, c’était différent. Que voulait-elle dire par « toute drôle, » exactement ? Il baissa la tête, son menton se posant contre sa tête. Il reprit donc sa question et haussa les épaules, presque imperceptiblement, les lèvres retroussées.

« Ça voulait simplement dire que je te laissais faire ce que tu veux. Tu sais, comme une poupée. Tu peux jouer avec moi si tu en as envie. Que ce soit dans un sens louche ou non. » Il inspira alors pour ensuite soupirer. Il ne savait même pas ce qu’il voulait dire par là, en fait. Qu’attendait-il ? Qu’est-ce qu’il cherchait ? Ce n’était plus simplement pour se moquer gentiment d’elle, à ce niveau-là. Il avait l’impression de profiter de l’innocence d’une pauvre jeune fille qui ne savait pas ce qu’elle faisait. Mais, en toute sincérité, être sa poupée ne le dérangeait même pas dans un contexte où ça ne dépassait pas ses propres limites. Au fond, il voulait simplement savoir ce qu’elle avait en tête. Pourquoi elle se sentait « toute drôle » et pourquoi elle ne l’avait pas aussitôt repoussé. Il reprit alors, sur un ton plus calme ; « Qu’est-ce que tu veux dire par toute drôle ? »

« Je veux dire par là que… »

L’ineo avait baissé la tête pour l’observer, l’écouter plus attentivement alors qu’elle débutait seulement ses explications. Elle ne semblait même pas savoir elle-même où elle voulait en venir. Cela dit, ce n’était pas très facile pour lui de comprendre les états d’esprits de la jeune Muneo. Était-elle comme ses confrères et sœurs, à ne jamais rien faire sans réfléchir de longues minutes avant ? Si elle était comme ça, alors ils n’étaient pas sortis du bois. Il ne saurait pas avant l’aube ce qu’elle voulait dire. Bon, c’était un peu poussé de le dire comme ça, mais à la voir aller, il avait presque l’impression d’être un vieux pédophile obligeant une pauvre jeune fille à faire des choses dont elle n’avait pas envie. Il s’apprêtait d’ailleurs à lui dire – une bonne fois pour toute ! – qu’il la taquinait, mais, chaque fois, elle s’enfonçait un peu plus loin elle-même et il n’avait pas réellement envie de l’empêcher de faire ses… découvertes. « Il y a comme un combat en moi… » Le jeune homme pinça les lèvres tandis que la main de Soo Jin se glissait contre son torse, puis son ventre, pour s’arrêter au niveau de son nombril et finalement monter le long de son corps, entraînant le t-shirt avec elle. L’air ambiant était froid – comme toujours, dans les cachots. Un long frisson parcouru donc son corps en entier lorsque la main de la jeune femme foula sa peau pour la laisser à l’air libre, les muscles de son ventre se raidissant d’ailleurs alors que ses doigts chatouillaient si délicatement sa peau. Réflexe. Il avait, lui aussi, observé attentivement sa main, jusqu’à ce qu’elle s’arrête dans sa course.

Pourquoi ne lui avait-il toujours rien dit ? Il était un bel idiot, sur ce coup-là. Il n’avait rien poussé et pourtant il avait déjà l’impression d’avoir gardé le silence trop longtemps. Autrement, elle ne serait pas déjà en train de tester le territoire de la sorte – parce que c’était bien ce qu’elle faisait, non ? Si elle en avait réellement envie, ça ne lui dérangeait pas, d’être sa dite ‘poupée’. Le regard de la brune se posa vers la nouvelle parcelle de peau qu’elle avait découverte et il leva le regard vers son visage, tentant de comprendre ce qui se déroulait dans sa tête. À quoi elle pensait, ce qu’elle en déduisait et comment elle voyait la chose. Ou peu importe la pensée qui traînait derrière son esprit. Il n’avait jamais été du genre à être curieux, mais, parfois, on ne pouvait s’empêcher de vouloir tout savoir. Comme présentement. « Une tentation à laquelle j’essaie de ne pas succomber. » Son cœur sauta bêtement un bond. Tentation ? S’était-elle encore emmêlée dans ses mots ou elle sous-entendait réellement qu’elle avait – peut-être – certaines envies sur lesquelles elle n’arrivait pas totalement à poser le doigt ? Il pinça les lèvres et cligna des yeux, décidant finalement qu’il était le temps de parler pour ne pas la laisser s’enfoncer trop loin. Ni qu’elle se sente obligée à quoi que ce soit. Mettre un terme à la blague si, du moins, c’en était toujours une. « Soo Jin… mh, tu n’es pas obligée de faire face à ce combat si tu n’en as pas envie. Je ne faisais que te taquiner, c’est pas… »

Trouver les mots était toujours plus difficile lorsqu’on se lançait sans réellement avoir réfléchit à ce que l’on allait dire. Surtout qu’il ne savait pas exactement ce qu’il devait lui avouer sur le moment. Il s’était tout de même amusé à ses dépens, pour le coup, et avait fait durer la blague plus longtemps qu’elle n’aurait dut. Il ravala sa salive. Il n’avait pas tendance à être nerveux. Non, il était plutôt ce genre de garçon très confiant – mais peut-être que c’était l’effet inverse, que lui faisait Soo Jin. Si lui, il lui permettait de prendre un peu plus de confiance, elle, au contraire, imprégnait son manque de confiance et sa gêne sur lui. Gêné, ça, non, oh, il n’en était tout de même pas à ce niveau-là… il posa sa main contre la sienne, son index traçant distraitement le contour de ses doigts contre son torse. « Je ne suis pas du genre à inviter des gens à dormir ici, ça va dans les deux sens… et je ne suis pas ce genre de garçon-là, non plus, tu sais. Mmh. Oui, je voulais juste te taquiner. » Il laissa un silence passer pendant lequel il réfléchissait visiblement, tout en ayant pourtant la tête vide de pensées. Son regard, vide, était toujours posé sur sa main et ses doigts traçaient toujours le contour de ses doigts.

Était-ce si difficile pour lui de communiquer ses émotions ou alors de si simples paroles avec une autre personne ? Oui, extrêmement. Alors quand il devait parler avec les gens, il n’était pas toujours adroit. Peut-être un peu trop franc et cru dans ses propos par moments. Mais pour le coup, il séchait. Ne passait-il pas pour un de ces garçons pervers et sans morale ? Il ne se souciait que rarement de la façon qu’avaient les gens de le voir. Pourtant, cette fois… c’était différent. Il soupira et grimaça, tournant finalement la tête vers elle, arrêtant de fixer le vide une bonne fois pour toute. Après tout, tout ce qu’il voulait dire, c’est qu’il la laissait effectivement faire ce qu’elle voulait puisqu’elle était dans sa lancée. Mais il ne voulait simplement pas qu’elle ait l’impression qu’il avait tout calculé ou, qu’alors, il faisait pression sur elle pour qu’elle le touche ou quoi que ce soit. Après tout, ça avait toujours été l’inverse pour lui. Il avait toujours aimé être celui qui touchait et contrôlait. Certes, ça ne lui déplaisait toutefois pas dans l’autre sens non plus. « Enfin, cela dit, tu peux tout de même faire ce que tu veux de moi. » Il lui adressa un mince sourire. « Ah, je me plaindrai quand même pas d’être ton cobaye. » Il relâcha sa main et la posa contre le lit, à ses côtés. C’était carte blanche pour elle. Elle pouvait faire ce qu’elle voulait, au final.

Avait-elle tout compris ? Parce que, pour Kessy, lui, il ne se contredisait pas. C’était simplement parce qu’il n’avait pas prévu la suite comme ça – mais, dans tous les cas, il n’allait pas s’en plaindre. De toute façon à présent, si elle n’avait pas envie de faire quoi que ce soit ou si, au contraire, elle avait envie de ‘découvrir’, c’était entièrement son choix à elle et il ne se sentait coupable en aucun cas. Personne ne pourrait le réprimander, là. Il ne lui tordait quand même pas le poignet… il fut presque surpris lorsque la main de Soo Jin passa de son ventre à son visage, ses fins doigts caressant délicatement sa joue. Le félin avait alors posé son regard vers le siens, la fixant, sans pour autant lui poser de questions – observant simplement ses réactions à elle et cherchant toujours à comprendre ce qui lui passait par la tête. Était-ce parce qu’elle était intimidée qu’elle était si tendue ? Parce que malgré tout, il pouvait parfaitement deviner qu’elle était déjà un peu nerveuse, stressée, peut-être effrayée ou simplement qu’elle ne savait pas quoi faire. Quelque chose dans ce sens-là. Il ferma les yeux lorsque son doigt commença à tracer les traits de son visage – ses yeux, son nez, ses lèvres, son menton… puis à nouveau ses lèvres. Les yeux toujours fermés, un nouveau sourire apparut au coin de ses lèvres tandis que sa main rebroussait le chemin pour revenir se poser sur son ventre. Il avait l’impression d’être la petite fille, en fait, en ce moment. La petite fille qui se laissait découvrir. Hm. Non, ce n’était pas aussi ridicule que ça pouvait le paraître, comme sentiment. Lorsqu’il ouvrit les yeux, il la surpris à fixer ses lèvres. Il pinça alors les lèvres, tentant de retenir ce sourire qui ne voulait pas disparaître. Elle décrocha le regard et, cette fois, il dut retenir un soupire. Si elle en avait envie, alors, pourquoi ne le faisait-elle pas ? C’était facile pour lui de le dire comme ça, au fond, il n’était pas à sa place. Il n’avait jamais été vraiment pudique ni n’avait réellement ressenti ce genre de gêne par rapport à ‘ce’ genre de contacts physiques. « J’ai envie de savoir ce qu’elles goûtent… tes lèvres. »

C’était à ne rien y comprendre, en fait. Elle semblait si gênée et pourtant, lorsqu’il s’agisseait de parler plutôt que d’agir, elle semblait beaucoup moins gênées. Du moins, lui n’aurait jamais réellement osé parler. Il aurait plutôt agis. Mais là, encore, on voyait bien la différence entre la présence féminine en Soo Jin et la présence masculine en Kessy. C’était souvent comme ça, au final. Il redressa lentement la tête et s’appuya sur un coude pour s’approcher d’elle. Elle avait à nouveau baissé la tête après avoir parlé. Contraste. Sa langue passa discrètement contre sa lèvre supérieure et il dut réfléchir à toute vitesse pour peser le pour et le contre, cette fois. Elle avait divulgué ses intentions et, au fond, elle attendait certainement juste un signe de sa part. À savoir ce qu’elle pouvait faire et ce qu’elle ne pouvait pas faire. Et pourtant, il lui avait dit qu’elle pouvait faire de lui ce qu’elle voulait. Mais, dans un sens, il pouvait comprendre que ce n’était pas forcément facile. Surtout si elle n’avait jamais fait face à ce genre de situation. « Fais-le, alors. »

Il se redressa juste assez pour s’approcher d’elle, attrapant doucement le menton de la plus jeune entre son pouce et son index pour lui faire tourner la tête. Son visage se retrouva alors tout prêt du siens, assez pour qu’il puisse sentir son souffle se balader contre sa peau, ses lèvres à peine à quelques millimètres des siennes. Son regard vint alors se poser contre ses lèvres à son tour, pratiquement immobile un instant. Il n’attendait pas qu’elle fasse les premiers pas, non. Il prenait tout simplement son temps. De toute façon, ils avaient toute la nuit. Au moins pour ce point, les vacances, c’était bien. Ses lèvres frôlèrent donc les siennes, l’attisant avec douceur, posant son autre main contre la main qui était restée au niveau de son ventre. Puis la seconde main, toujours sous son menton, se glissa vers sa nuque et il l’attira à lui, ses lèvres rencontrant finalement les siennes. Ça n’avait rien de vulgaire, rien qu’on aurait pu réellement décrire de ‘passionné’, mais c’était doux. Délicat. D’ailleurs, il ne détacha pas ses lèvres des siennes mais n’osa pas non plus pousser la chose trop loin. À elle de décider, à présent, où elle voulait mener ce baiser. Parce qu’après tout, elle avait divulgué ses envies et il avait simplement poussé les choses afin que ces dites ‘envies’ se réalisent. La suite de l’histoire lui appartenait, et si elle lui disait exactement ce qu’elle voulait de sa part, ça ne lui dérangeait pas non plus – il serait plus qu’heureux d’accomplir ses souhaits. Et donc plutôt que de pousser la chose, il se concentra plutôt sur la main posée contre son ventre, resserrant son emprise sur cette dernière, ses doigts – froids – profitant en même temps du contact chaud de la peau de la jeune femme. Il fit alors glisser cette même main un peu plus haut sous son haut, jusqu’à son torse, tout prêt de son cœur.

Au bout d’un petit moment, il détacha finalement ses lèvres des siennes et son doigt se glissa à nouveau sous son menton qu’il caressa discrètement avant de s’écarter, juste assez pour prendre suffisamment de distance pour la ‘prochaine étape’. Il n’était toujours pas certain que c’était ce dont elle avait envie, mais ce n’était pas non plus comme si c’était particulièrement grave à ce niveau-là. Il tira donc contre le bord de son t-shirt, lui lançant un regard interrogatif. Voulait-elle qu’il l’enlève ou alors ne voulait-elle pas ? Lorsqu’il ne vit aucun signe négatif chez la jeune femme, il se débarrassa de ce dernier, le retirant pour le laisser retomber au sol. Puis de longs frissons apparurent à la surface de sa peau. C’était bien le seul inconvénient à dormir dans les cachots. Il faisait toujours froid, même en plein été. Soit froid, soit humide. « Ce n’est pas si compliqué, non ? Si tu veux… tu peux me dicter et je ferai en sorte de… enfin, je suivrai tes instructions. »

« Vois l’effet que tu me fais. Il n’y a pas d’instructions à suivre… »

Soo Jin avait alors prit sa main pour la poser au niveau de sa poitrine, là où il pouvait sentir son cœur battre. Effectivement, il battait très rapidement. Était-ce réellement lui qui lui causait cet effet ou alors simplement la situation en elle-même ? C’est vrai, peut0être que ça aurait pu être n’importe quel autre garçon. Au fond, il s’en fichait. Pour le moment c’était lui, et il appréciait cette attention et la façon qu’avait de décrire ses émotions sur le moment la brune. Il n’y avait peut-être pas d’instructions à suivre, mais sur le moment, lui non plus ne pouvait savoir ce qu’elle voulait exactement. C’était difficile lorsqu’on faisait face à une jeune femme comme Soo Jin – elle savait ce qu’elle voulait, ça, il n’y avait aucun doute. Mais elle savait exactement ce qu’elle ne voulait pas, ça aussi, il en était sûr. Et s’il faisait quelque chose qu’elle ne voulait pas, au final, c’était lui qui était à blâmer. Un court moment passa avant qu’elle ne passe ses bras autour de son cou pour joindre ses lèvres aux siennes à nouveau, chose à laquelle il ne s’était effectivement pas attendu sur le moment. Il fut un peu surpris au départ mais ça ne dura pas, et il posa une main contre sa taille, profitant simplement du baiser qu’elle lui offrait, en quelque sorte heureux qu’elle prenne cette initiative. C’était déjà un bon pas, et ça faisait plaisir. Le baiser fut un peu plus long, mais tout de même court à son goût. On y prenait goût rapidement. En même temps, ce toucher, cette sensation… il y avait bien longtemps maintenant qu’il n’avait pu en profiter, en y pensant. Il réalisa alors que, peut-être, finalement, ce n’était pas une très bonne idée. Alors, dans son état, serait-il réellement capable de contrôler et de ne pas franchir les limites jusqu’au bout ? Difficile, mais il devait absolument y arriver. « J’ai juste… soudainement envie de toi, mais je… » Et encore un frisson. Ça ne faisait qu’ajouter à sa torture mentale. Il était peut-être masochiste, finalement. Un peu. Beaucoup.

De nouveaux frissons apparurent à la surface de sa peau lorsque ses doigts foulèrent sa peau à présent nue, de ses épaules jusqu’à ses bras, puis finalement ses mains. Il accepta le baiser sans s’attendre à la suite, laissant tout de même la plus jeune guider ses mains jusqu’à – sa poitrine. Ses mains furent immobiles une seconde. Ça avait le mérite d’être clair, au moins. Son regard retrouva le siens lorsque leurs lèvres se séparèrent. « Alors, est-ce que je peux te faire confiance, Key ? » Pouvait-elle lire dans ses pensées ? Elle avait posé cette question juste au bon moment, visiblement. Et il se posa la question à lui-même, aussi, doutant une seconde de ses propres intentions. Il ravala discrètement sa salive et cligna des yeux. Oui, elle pouvait lui faire confiance – si jamais… il n’avait qu’à lui dire ou alors faire en sorte que ça ne dépasse pas les limites. Si jamais. Il hocha lentement la tête, confiant. Il pouvait le faire. Il n’allait pas perdre ses intentions de vue. Maintenant que ça, c’était mis au clair, il se permit donc de bouger un peu. Faire quelque chose. Parce qu’il avait certainement l’air idiot, là. Il n’allait tout de même pas passer pour un imbécile qui ne savait pas quoi faire. Ses mains retombèrent au niveau de sa taille et il changea les positions, l’invitant à se coucher sur le lit. Il resta assit un petit moment à ses côtés, sa main gauche se posant simplement à la naissance de sa poitrine pour descendre lentement le long de son corps, jusqu’à son ventre, qu’il découvrit doucement avant de se redresser pour venir au-dessus d’elle. Il glissa un genou entre ses jambes pour qu’elle les écarte, s’y glissant prudemment. « Tu peux me faire confiance. Oui. »

Petite erreur de calcul de sa part, peut-être. Il semblait que cette position ne pouvait qu’amener des idées à notre pauvre Ineo, qui inspira lentement. Sa main droite revint se poster contre son corps, au niveau de son épaule, tandis qu’il baissait la tête pour sceller ses lèvres aux siennes à nouveau. Pendant ce temps, sa main descendit le long de son corps pour atteindre le premier bouton de sa chemise. À l’aide de son pouce, il détacha le premier, sans difficulté. Puis il passa au second et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’elle soit assez ouverte pour qu’il puisse y passer une main. Il ne la lui enlèverait pas tout de suite – du moins, si elle voulait qu’il lui enlève à un moment. Ses doigts se faufilèrent donc sous le tissus pour se poser sur sa poitrine, passant directement sous son soutien-gorge pour s’y poser à même la peau. Il détacha alors ses lèvres des siennes, redressant la tête juste assez pour voir son visage. Après tout, à ce moment-là, c’était important pour lui de voir ses réactions. Savoir s’il faisait quelque chose de trop, ou si c’était plutôt positif. Il attendit donc un moment avant de passer son pouce sur son extrémité, le sentant presque automatiquement se durcir sous sa paume. D’ailleurs, le petit bout de chair rosée n’était certainement pas la seule chose qui commençait à durcir – mais ça, passons. Depuis quand était-il si sensible à la présence d’une femme ? Il ne se rappelait plus. Peut-être que c’était le contexte, le temps, ou alors peut-être que c’était la pureté de la brune ou tout simplement elle. Il n’osa d’ailleurs pas trop coller son corps au siens, par peur de L’effrayer. La réaction, dans tous les cas, lui semblait positive. Il repoussa alors un peu le dit soutien-gorge et glissa à nouveau sa main sur la galbe de sa poitrine, ses doigts venant cette fois s’attarder un peu plus à son téton. Ses lèvres se posèrent alors contre sa gorge, descendant lentement le long de celui-ci jusqu’à la naissance de son épaule, où il mordilla délicatement la peau. Il s’attarda plusieurs secondes à cette nouvelle ‘occupation’, la laissant s’y habituer. Si c’était réellement la première fois qu’on la touchait de la sorte, il préférait lui laisser un moment pour s’habituer. Puis au bout d’un certain temps, il osa enfin coller son corps au siens, son bassin s’appuyant contre le siens. Il redressa alors la tête pour lui adresser la parole, la voix un peu plus basse. « Si quelque chose te gêne… n’hésite pas… »

Le gémissement qu’avait laisser passer la plus jeune entre ses lèvres avait eu un effet incontrôlable sur lui, sur son corps, sur son esprit. Il pouvait déjà sentir sa peau se réchauffer malgré le froid du dortoir, ses pupilles qui s’assombrissaient probablement déjà, plantées dans les siennes. Elle avait donc hoché de la tête lorsqu’il lui avait demandé de le lui dire si quelque chose la gênant dans ce qu’il faisait. Il n’avait pas l’intention d’aller trop loin, non, certes, mais ce ‘geste’ pouvait peut-être effectivement lui donner une drôle d’impression. Normal. Essayait-elle de cacher les réactions de son corps face à ses avances ? Il devait retenir son sourire, encore une fois. Il y avait des choses qui ne trompaient pas. Certes, elle ne pouvait pas voir ces choses, mais Kessy, lui, pouvait parfaitement le voir. Notamment ses pupilles aussi noircies que les siennes, ses joues rosées, son cœur qui battait beaucoup plus rapidement. Le reste, peut-être qu’il le découvrirait – ou pas, c’était à elle de le décider, mais il y avait une chose qui ne trompait définitivement pas. Un long frisson parcouru sa nuque lorsqu’elle murmura son prénom et il dut se retenir de ne pas faire un quelconque mouvement de trop, peut-être trop obscène pour elle, trop poussé pour lui. En attendant, il la laissait découvrir son corps à lui à son tour, sa mâchoire se resserrant. Les muscles de son ventre se raidirent un peu lorsque ses mains passèrent vers l’avant de son pantalon et il baissa la tête, ses lèvres venant retrouver le creux de son épaule. Puis la jeune femme vint rechercher ses lèvres et il les scella sans opposer de résistance, expirant doucement par le nez alors qu’elle détachait le bouton de son jean. C’était un soulagement, mais pas tout à fait encore. Il mordilla la lèvre inférieure de la brune et glissa son nez le long de sa mâchoire jusqu’à son oreille, où il souffla doucement, son souffle chaud courant le long de sa peau.

Comment gérer la suite ? Voulait-elle qu’il enlève son pantalon, ou pas maintenant ? Voulait-elle un toucher plus concret ou se contenterait-elle de rester à ce niveau ? C’était comme un jeu de devinette, et si Kessy n’avait jamais eu de mal à ce genre de jeux, cette fois, c’était plus compliqué. Il n’y avait pas de bouquins, pas de cours qui expliquaient comment comprendre ce genre de choses. Sa main droite lâcha finalement sa poitrine pour descendre le long de son corps, déboutonnant le reste de sa chemise jusqu’à ce qu’elle soit complètement ouverte, laissant apparaître son ventre, ses hanches… il baissa alors la tête et posa ses lèvres contre sa clavicule, descendant à la naissance de sa poitrine, puis suivant un chemin précis au milieu de son buste. Sa main était restée tout prêt de ses côtes pour venir se placer contre ses hanches, son pouce massant délicatement sa peau, passant tout prêt de son nombril pour descendre au bas de son ventre, jusqu’à ce qu’il ne puisse aller plus loin. Là, ses doigts chatouillèrent tout aussi délicatement sa peau et il redressa la tête pour apercevoir son visage. Il savait qu’elle se retenait toujours, qu’elle semblait gênée. Ce n’était pas facile pour elle, forcément, et même si, pour elle, ça pouvait paraître trop ‘facile’ de dire ce genre de paroles, il ne pouvait s’empêcher de le lui dire. Sa main descendit plus bas, là où il n’y avait plus de peau, contre son short pour aller vers sa cuisse qu’il redressa juste assez pour pouvoir se presser contre son entrejambe. « N’essaie pas de te retenir… il n’y a personne dans la chambre. Et ta voix... » Avait-il alors murmuré tout prêt de son oreille avant de bouger contre elle, comme pour prouver son point. Il ne pouvait le dire autrement. Il devait tout de même lui dire les vrais choses, et à défaut de ne pas pouvoir – ou alors, vouloir – utiliser trop de ‘mots’ qui ne se disaient pas, il ne pouvait que le lui montrer à l’aide de son corps. « … c’est l’effet que ça me fait. »

Il fut immobile un instant, profitant simplement du contact sans en ajouter, observant la réaction de la plus jeune. C’est au bout de plusieurs secondes seulement qu’il daigna enfin bouger, mais ce fut uniquement pour glisser sa main entre leurs deux bassins. Là aussi, il avait besoin de ‘respirer’ un peu. Il fut plus ou moins discret dans son geste alors qu’il glissait la fermeture éclair vers le bas, le revers de sa main passant furtivement entre les jambes de Soo Jin au passage. C’est par la suite qu’il glissa sa main sous le corps de la plus jeune pour qu’elle le suive alors qu’il se redressait, la laissant s’asseoir pour passer ses mains contre ses épaules, laissant sa chemise glisser lentement de ses bras jusqu’au lit. Il la lui retira donc totalement et la laissa retomber au sol avant de passer sa main dans son dos, détachant avec presque trop de facilité l’agrafe de son soutien-gorge. Il ne la lui retira cependant pas tout de suite et la redéposa doucement sur le lit. Il ne voulait toujours pas la brusquer ou alors faire quelque chose de trop, et il avait donc décidé de patienter avant de lui retirer le dernier morceau de vêtement. Au moins, ça, c’était déjà fait. Sa main glissa à nouveau le long de son corps pour venir se placer sous sa cuisse qu’il caressa doucement, s’appuyant sur un coude pour pouvoir caresser son visage de son autre main. Son corps à présent collé au siens, il pouvait parfaitement sentir le cœur de Soo Jin battre à la chamade. Était-ce à cause des sensations qu’elle ressentait en ce moment ou alors parce que la situation en elle-même la stressait à ce point ? Peut-être, aussi, que c’était parce qu’il venait de lui retirer son haut. C’est pour cette raison qu’il colla un peu plus son corps au siens, comme pour lui donner moins l’impression d’être mise à nue. Après tout, ce genre de choses, c’était à la base dans le but de sentir le corps de l’autre et de ne faire qu’un lorsque l’envie était trop puissante. Lui pour sa part, c’était surtout pour le côté plaisant de la chose. Il n’avait pas encore eu la chance de ressentir ce genre de sentiments et ne pouvait donc pas le lui enseigner. En attendant, il vint mordiller la peau de son cou comme elle semblait l’avoir apprécié un peu plus tôt, suçotant ce même bout de peau. Une petite marque rouge apparut d’ailleurs à la surface de sa peau laiteuse et il y posa un baiser avant de redresser la tête. Lui aussi pouvait être doux, non ?

Ce n’était pas un bourrin, contrairement à ce qu’on aurait pu penser. Lorsqu’il put sentir son rythme cardiaque reprendre un battement plus ou moins normal – du moins, moins rapide – il se permis de redresser la tête pour lui demander en toute honnêteté ; « Tu veux que je l’enlève… ? », désignant son pantalon.